. Les Cahiers pédagogiques : médiateurs mais pas seulement Les Cahiers pédagogiques ont vu le jour en 1945. Ils avaient la mission de coordonner les efforts des " classes nouvelles " conçues aux lendemains de la Libération comme ferment de transformation de l'enseignement secondaire. Alors simple bulletin de liaison modeste, la revue est devenue peu à peu un outil majeur de diffusion des innovations dans l'éducation nationale, de la maternelle à l'université. Vulgarisateurs des recherches et médiateurs entre diverses " strates " du monde enseignant, ils se veulent agent dynamique de transformation, et sorte de porte-parole d'un mouvement pédagogique qui va bien au-delà du CRAP (Cercle de recherches et d'action pédagogiques), association créée en 1963 pour piloter l'élaboration et la diffusion de la revue. REVUE PROFESSIONNELLE ENGAGÉE Les Cahiers
sont la revue d'un mouvement qui s'est constitué, donc, historiquement,
bien après la création de la revue. Ceci révèle
des liens subtils entre la revue et l'association puisqu'en aucun cas,
les Cahiers ne sont " l'organe " d'un mouvement militant, chargé
d'appliquer une " ligne ". Les relations entre les deux instances
restent souples, permettant d'éviter, d'une part, la " dérive
dogmatique " et les langues de bois bardées de certitudes
et, d'autre part, la " dérive commerciale " (ne publier
que ce qui se vend, sacrifier à une sorte d'audimat pédagogique).
En fait, en perdant leur âme, les Cahiers perdraient aussi
leur relative audience, puisque leur originalité consiste justement
dans l'entre-deux. PAR QUI LA REVUE EST-ELLE ÉCRITE ? Le mythe quasiment
fondateur, c'est l'élaboration d'une revue écrite par ses
lecteurs. Mais ce mythe d'origine continue aujourd'hui à inspirer
la manière dont est fabriquée la revue. Certes, c'est bien
à partir d'un comité de rédaction que voit le jour
chaque numéro. C'est ce groupe, composé majoritairement
de personnes exerçant, au moins partiellement, devant des élèves
qui est chargé de définir, en toute indépendance,
la ligne éditoriale même si le mouvement pédagogique
CRAP veille à ce que les grandes options, les grands principes
militants soient respectés. Ainsi, une large confiance est faite
aux responsables de la revue, mais aussi aux " coordonnateurs "
qui, sous le contrôle de l'équipe rédactionnelle,
se voient confier la réalisation de la partie centrale de chaque
numéro : un dossier de 50 pages consacré à une question
d'actualité ou à un thème plus atemporel (de "
Des pistes pour changer le collège " à " Souffrances
de profs "). À QUOI SERT UNE REVUE PÉDAGOGIQUE ? On voit donc
qu'une revue comme les Cahiers pédagogiques se situe à
l'interface d'un pôle " recherche " et d'un pôle
" pratique ", à une place voisine de celle qu'occupe
la formation. Non un " juste milieu " entre pratique et théorie,
mais un outil pour que ces mondes-là ne se trouvent pas séparés,
pour qu'il y ait circulation et échanges entre sciences de l'éducation,
didactique et " pédagogie " au quotidien, y compris dans
les tensions fécondes et les controverses sur la place de chacun. UNE REVUE POUR LE XXIe SIÈCLE Cependant,
comment s'ouvrir à de nouveaux lecteurs, sans renoncer à
l'exigence ? Comment faire écrire davantage les praticiens, inventeurs
de dispositifs pédagogiques, modestes soutiens de la lutte contre
l'échec scolaire, parfois paralysés devant la page blanche
? Comment se professionnaliser encore plus sans pour autant renoncer aux
aspects militants qui restent essentiels ? Nous n'avons aucune réponse
définitive à toutes ces questions. Comme la pédagogie,
la production des Cahiers est une entreprise incertaine et fragile
parce qu'elle ne vit que des questions que se pose le monde enseignant
plutôt que des certitudes dans lesquelles s'enferment les clans
et les chapelles. Jean-Michel
Zakhartchouk
10 numéros
par an. CRAP-Cahiers pédagogiques: 10, rue Chevreul, 75011 Paris (1) L'expression est de Hervé Hamon, lors du colloque des cinquante ans de la revue (cf. Une idée positive pour l'école de demain, Hachette-éducation, 1996). |
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