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d'école au paradis
Madame l’assesseur, pourquoi
l'école de Chamois a-t-elle été fermée ?
En 1990, les parents des élèves ont décidé
que leurs enfants fréquenteraient dorénavant l'école
primaire d'Antey-Saint-André; c'est pourquoi, nous avons été
amenés à fermer l'école communale. Aujourd'hui, un
retour en arrière serait quasiment impossible parce qu'il serait
difficile de trouver les dix élèves indispensables à
sa réouverture. Il ne faut pas oublier, en effet, qu’actuellement
Chamois compte seulement 99 habitants.
À l'époque, la municipalité craignait une ultérieure
diminution de la population. On aurait voulu garder l’école
en pensant que, sans elle, les quelques personnes désireuses de
venir s'installer ici auraient pu se décourager et que des familles
d’ici auraient été tentées de descendre définitivement
dans la vallée afin d'éviter les désagréments
causés par le déplacement quotidien des enfants.
Justement, quels sont ces désagréments
?
Pour les parents, le principal problème est celui d’accompagner
leurs enfants à l’école.
La municipalité de Chamois apporte sa contribution en participant
aux frais soutenus par la commune d’Antey-Saint-André, (6
070 E. par an pour le chauffage, la dame de service, etc). Elle fournit
à chaque enfant une carte valable pour 300 courses par an en téléphérique
; ce qui couvre amplement les besoins scolaires.
Grâce au financement de l’Administration régionale,
on a pu se doter d’un véhicule électrique pour conduire
les enfants de la gare d’arrivée du téléphérique
située à Buisson jusqu’à l’école
d’Antey.
Pour les familles, le coût est de 16 E. par mois.
En ce qui concerne le repas de midi, un accord a été passé
avec la mairie d’Antey. Les familles ont à débourser
20,66 E. par mois et 1,30 E. par ticket repas. Des réductions sont
éventuellement prévues dès le deuxième enfant.
Ce ne sont pas de grandes sommes mais il est clair que ce sont des dépenses
supplémentaires pour les familles et la municipalité.
La mairie se charge donc de l’organisation complète de tout
le service de transport.
Elle doit prévoir un moyen alternatif quand le téléphérique
est arrêté à l’occasion des travaux d’entretien
nécessaires, en cas de panne, ou pour d’autres motifs.
En outre, une jeep a été équipée pour le transport
des enfants en hiver.
Il arrive aussi que l'école doive adapter ses horaires quand elle
organise des excursions ou des activités hors de l’établissement
; mais des courses supplémentaires du téléphérique
peuvent être éventuellement prévues pour ces cas particuliers.
Enfin, il y a le problème de l'accompagnement des enfants sur le
trajet de la gare d’arrivée du téléphérique
jusqu’à l'école. La solution pourrait être un
tour de rôle organisé par les parents.
À quels problèmes
les élèves doivent-ils faire face ?
Nos enfants doivent se lever beaucoup plus tôt que la plupart de
leurs camarades et il ne faut pas rater le départ du téléphérique.
C’est une première source d’inquiétude à
laquelle n’étaient pas soumis ceux qui fréquentaient
l’école sur place. Autrefois, les écoliers n'étaient
pas obnubilés par l'horaire du périphérique, ils
se rendaient tranquillement à l'école à pied. Maintenant,
ils ont la responsabilité de leur transport et il est clair que
le temps " perdu " dans les déplacements l'est aussi
au détriment de celui consacré à l'étude et
aux jeux et tout au long de l’année ces enfants sont ballottés
deux fois par jour sur 700 m de dénivelé.
Mais pourquoi les familles ont-elles
opté pour la fermeture l'école de Chamois ?
Les parents craignaient surtout l’isolement de leurs enfants et
ils avaient peur de les priver de relations sociales.
Pour ma part, je crois que c'est davantage une question de mode. Je peux
comprendre l’inquiétude des familles, mais je ne pense pas
qu'à notre époque, on puisse dire qu’un enfant qui
habite à 1 800 mètres d'altitude, est isolé du reste
du monde : le tourisme, la télévision et les autres moyens
de communication leur permettent de connaître et de participer à
la vie du reste du monde. De plus, d’après moi, ils ne sont
pas moins isolés que les enfants des villes, qui sont souvent tout
seuls devant la télévision et qui trouvent de moins en moins
de véritables occasions de rencontre avec des enfants de leur âge.
Il est certain que l’isolement et le problème des relations
sociales sont des aspects importants, mais je ne suis pas sûre que
la solution adoptée ait été la meilleure.
Les contacts de nos enfants avec leurs camarades de l'école d'Antey-Saint-André
existaient déjà, bien avant la fermeture de l’école
: deux fois par semaine, avec ses collègues d'Antey-Saint-André,
notre institutrice prévoyait des rencontres et organisait des activités
communes avec les élèves des classes d’en bas. Je
ne pense donc pas qu’actuellement nos enfants aient vraiment davantage
de relations sociales qu’autrefois.
Interview de Paola Brunet
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