TERRITORIO FRAGILE
Connaissance du territoire et solidarité de la collectivité ont permis de faire façe promptement aux effets catastrophiques provoqués dans notre région par l'alluvion d'octobre.
15 OCTOBRE 2000: JOURNAL D'UN MAIRE
par Cassiano Pascal
Il pleut! Hier il pleuvait, avant-hier aussi. Il en est ainsi depuis plusieurs jours. Des ruisseaux, des torrents creusent les flancs des montagnes. La Doire monte, la cascade Lenteney prend des allures de chute du Niagara.
Dans cette atmosphère de cataclysme l'état d'alerte a été déclaré ce dimanche matin; Derby s'anime. En effet, le torrent de Tillac est sorti de son lit, a dévalé la rue centrale du hameau de Saint-Ours; les eaux ont envahi les caves. Les pompiers volontaires sont en effervescence car le passage souterrain sous la voie de chemin de fer est entravé par un éboulement. D'autres dégagent les détritus, pompent l'eau, s'activent à porter secours aux personnes en difficulté.
A peine le torrent a débordé la population qui montait la garde a donné l'alarme, la mairie a été informée de la situation mais, réaction encore plus efficace des gens, l'entrepreneur qui avait parqué sa pelle mécanique dans le quartier est déjà à l'oeuvre pour dévier le cours des eaux, arrêtant ainsi le torrent impétueux au coeur du village, faisant fi des diverses autorisations administratives qui, dans des cas comme celui-ci, ne sont rien d'autre que des entraves à l'intervention.
L'administration communale vient voir, consulte, interpelle, et, à la suite de l'avis de géologues et de techniciens régionaux, le maire décide de faire évacuer le village.
Tous les habitants du hameau Saint-Ours seront personnellement avisés par le maire et ses adjoints de la situation et de la nécessité de quitter leur habitation par mesure de précaution.
Les réactions sont diverses : compréhensibles, coopératives, individualistes, soucieuses, anxieuses, houleuses, tumulteuses, agressives... Certains, au nom de la tradition, (le hameau est là depuis des siècles, le torrent n'a jamais emporté aucune habitation...), d'autres, parfois avec un peu de prétention, considèrent que la mesure d'évacuation est excessive, font légitimement les comptes dans les caisses de la mairie et trouvent la dépense superflue.
Pourtant tous sont, au fond, d'accord pour dire qu'aucune vie humaine n'est monnayable et même les plus réticents quittent leur logement.
Cette situation durera plusieurs jours car le danger est réel, comme l'illustrera l'expertise du géologue chargé d'analyser la situation.
Au bout de quelques jours, l'administration communale organisera une séance publique au cours de laquelle elle informera la population concernée par la situation de la menace réelle d'éboulement et offrira l'hospitalité, non plus simplement à l'hôtel, mais dans les appartements des résidences secondaires pris en location.
La mairie organisera et prendra en charge l'évacuation de 68 personnes résidentes (certaines d'entre elles avaient déjà abandonné leur habitation de leur propre initiative).
Cette épée de Damoclès pèsera lourdement et pendant plusieurs jours sur la tête des habitants du hameau.
Il est évident que malgré toutes les bonnes volontés pour gérer cette situation elle s'est accompagnée d'inconvénients mais, dans ces cas-là, ne faut il pas choisir les moindres ?
Outre au gîte et au couvert, l'administration communale avait organisé l'état de siège du hameau par les forces de l'ordre, le corps forestier, les pompiers volontaires, afin d'éviter tout saccage.
Puis, de pratique administrative en expertise, il s'est avéré nécessaire d'intervenir lourdement sur ce phénomène décrit comme une menace d'éboulement important. A la lumière des derniers sondages sismiques qui utilisent les phénomènes de réfraction des ondes sonores pour évaluer l'état et la nature des couches sous-jacentes ainsi que leur épaisseur, le phénomène s'est avéré plus important que ce qu'on avait estimé dans un premier temps.
L'épaisseur de la couche instable varie de 0,6 m à 12 m pour une moyenne de 6 à 7 m et pour un volume total évalué à 45.000 m3.
Des travaux s'imposent, certaines interventions ont déjà pu être réalisées mais le mauvais temps, une certaine lenteur administrative, (bien compréhensive dans cette situation toute particulière de notre région après l'alluvion), le froid et enfin la neige ont bloqué les opérations. Dans un premier temps, il a fallu enregistrer quotidiennement les mouvements de la faille. Et actuellement, il s'est avéré nécessaire d'installer à nouveau un système de contrôle en accord avec le service compétent de l'administration régionale.
Au printemps, les travaux s'effectueront car ils ont été englobés dans le plan des travaux urgents prédisposé par l'administration régionale sous requête de l'administration communale. La Région, la population dans son ensemble s'est mise en quatre pour sortir de ce marasme. La détermination farouche, la volonté résolue, la force et le courage de toute la population ont permis une reconstruction éclair.
La neige a recouvert de son blanc manteau toutes les cicatrices de notre territoire, lui redonnant son charme habituel et permettant d'accueillir honorablement les nombreux touristes présents pour les fêtes de fin d'année.
Les phénomènes alluvionaux qui ont frappé notre région, nous ont rappelé à quel point la solidarité, la disponibilité, la coopération, peuvent permettre de faire face à de graves difficultés. L'intérêt de chacun pour les environs de chez lui, la responsabilité avec laquelle la plupart des habitants tiennent sous contrôle les divers cours d'eau avoisinants, les précautions prises pour éviter des catastrophes, la participation active à la gestion du territoire ont été autant de leçons discrètes de vie civile.
Une réflexion s'impose, sans pour cela prétendre jouer au sociologue ou à l'anthropologue.
Le montagnard est, par nécessité, habitué à un milieu souvent hostile, à des conditions de vie rudes. Son caractère tenace l'incite à lutter jusqu'au bout, à ne pas se résigner: l'inaction, l'immobilité en montagne ne pardonnent pas.
Autrefois, la tutelle et la protection du territoire étaient empiriquement assurées par la population. Elle n'attendait rien de personne d'autre que de la communauté. La solidarité était spontanée et immédiate. L'intérêt de la collectivité s'identifiait parfaitement à l'intérêt individuel. On agissait par nécessité pour le bien de tous.
Cette solidarité, cette conscience d'appartenir à la même réalité sont des traits bien ancrés dans le tempérament valdôtain.
Le téléphone (et le téléphone arabe : le message qui passe de bouche à oreille) fonctionne à une rapidité incroyable pour interpeller tous les hommes de bonne volonté qui, armés de pelle, d'outils divers et surtout d'une connaissance du territoire ainsi que du bon sens que l'on tire de l'expérience, du concret, de la terre, agissent promptement dans l'intérêt général.
La protection du milieu, la tutelle de l'environnement ne peuvent en aucun cas se passer de la présence humaine sur le territoire. C'est elle qui connaît, voit, contrôle la situation.
Quand l'individu se retire derrière les institutions, les organisations de tous types, quand il délègue, son absentéisme engendre de graves difficultés. Au lieu d'agir, il contemple, critique, donne des conseils et des leçons mais de quel droit, avec quelle compétence s'il a perdu l'expérience, la pratique du territoire!
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